La mise à mort médicale arrive en France

Réseau International – 15 août 2024

par Essentiel News

L’euthanasie active, cheval de bataille de la franc-maçonnerie, doit être votée à l’automne.

Le 8 novembre 2023, le chef de l’État français Emmanuel Macron se rend au siège du Grand Orient de France. Pour marquer le 250ème anniversaire de la plus ancienne obédience maçonnique française, il prononce un discours dans lequel il promet un projet de loi pour permettre une «aide active à mourir», un thème «auquel la franc-maçonnerie porte une attention particulière».

Il tient parole et le 10 avril 2024 c’est chose faite : le projet de loi 2462 est soumis à l’Assemblée nationale. Le texte entend légaliser l’euthanasie active. Deux jours plus tard, le Figaro titre, sans complexe et dans une indifférence relative : «Euthanasie : la dernière croisade des francs-maçons».

Et le journal de nous expliquer que pour le grand maître du Grand Orient de France, Guillaume Trichard, ce projet de loi est «un soulagement». En effet, la loi facilite grandement la mise à mort en autorisant le recours à une substance létale.

Le 17 mai 2024, les députés réunis en commission adoptent un texte allant encore plus loin que la version originale. Désormais, il n’est plus nécessaire que le candidat à la mort soit atteint «d’une affection grave et incurable», au pronostic vital engagé «à court ou moyen terme» ; la nouvelle mouture autorise l’euthanasie pour une personne simplement «atteinte d’une affection grave et incurable en phase avancée ou terminale».

Autre ajout majeur au texte : l’instauration d’un «délit d’entrave au suicide assisté». Un amendement prévoit en effet une peine d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende pour quiconque se rendrait coupable «d’empêcher ou de tenter d’empêcher de pratiquer ou de s’informer sur l’aide à mourir par tout moyen».

Par suite de son adoption en commission, l’hémicycle débat ensuite du projet de loi en première lecture jusqu’au 7 juin 2024, avant de s’interrompre suite à la dissolution de l’Assemblée nationale. Les travaux doivent reprendre à l’automne.

D’autres pays la pratiquent déjà

Dans «Hommage à un journaliste exilé» (1955), Albert Camus écrivait : «Le bien-être du peuple en particulier a toujours été l’alibi des tyrans, et il offre de plus l’avantage de donner bonne conscience aux domestiques de la tyrannie».

C’est en effet avec l’argument d’abréger la souffrance des malades que l’euthanasie est toujours présentée. Et pour savoir quelle est véritablement l’intention des planificateurs, il suffit de se pencher sur ce qui se passe à l’étranger, dans les pays où l’euthanasie active est ancrée depuis plus longtemps.

Aux Pays-Bas par exemple, le professeur d’éthique de la santé Theo Boer explique :

«Permettez-moi de résumer ce qui s’est passé aux Pays-Bas au cours des quarante dernières années. Dix années de tolérance de l’euthanasie et huit années de loi provisoire ont été suivies d’une loi définitive en 2002. J’étais d’abord convaincu que nous avions trouvé le juste équilibre entre la compassion, le respect de la vie humaine et celui des libertés individuelles.

C’est la raison pour laquelle le gouvernement m’avait demandé de faire partie de l’un de nos cinq comités d’examen régionaux. Mais au fil des années, nous avons assisté à une augmentation spectaculaire du nombre de cas, de 2000 en 2002 à presque 10 000 aujourd’hui.

À certains endroits des Pays-Bas, jusqu’à 15% des décès sont dus à l’euthanasie et tout le monde s’attend à ce que les chiffres continuent d’augmenter. Nous avons également constaté des changements dans la manière d’interpréter les critères juridiques.

Tel est le paradoxe de la légalisation de la mort administrée : ce qui est perçu comme une opportunité bienvenue par ceux qui valorisent l’autodétermination devient rapidement une incitation au désespoir pour d’autres.

J’ai vu des centaines de rapports d’euthanasie dans lesquels le souhait de protéger les êtres chers de l’agonie, de leur éviter d’être témoins de leur souffrance ou d’avoir à supporter le fardeau des soins était l’une des raisons, sinon la raison essentielle, de la demande d’euthanasie.

Dans une société où l’aide à mourir est possible, les personnes sont confrontées à l’un des choix les plus déshumanisants : est-ce que je veux continuer à vivre ou est-ce que je veux mettre fin à ma vie ? Par conséquent, restez vigilants et faites tout ce qui est possible pour que des critères stricts soient mis en place.

Évitez que l’aide à mourir devienne une partie intégrante de votre système de santé. Cela saperait la détermination de la société à porter assistance aux plus vulnérables, et inciterait à baisser les bras. Le visage de la médecine serait radicalement altéré».

Les Pays-Bas sont bien un cas d’école ; une enquête sur les médecins néerlandais intitulée «The Report of the Dutch Committee on Euthanasia» («Le rapport de la commission néerlandaise sur l’euthanasie»), publiée en 1991 par la revue Issues in Law and Medicine a révélé que, depuis la légalisation de l’euthanasie, 1030 patients avaient été tués sans leur consentement ; parmi eux, 140 avaient toutes leurs facultés mentales et 110 n’avaient qu’une légère déficience mentale.

Ce genre d’enquête n’est pas réalisé souvent ; on ne sait donc pas comment ces chiffres ont évolué depuis les années 1990. Ce qu’on sait en revanche c’est qu’en avril 2023 le gouvernement néerlandais a annoncé que l’euthanasie serait désormais possible pour les enfants de moins de 12 ans.

La Belgique quant à elle est devenue en 2014 le premier pays européen à autoriser sans limite d’âge (mais «en capacité de discernement») les enfants à choisir l’euthanasie pour «abréger leur souffrance».

L’eugénisme comme politique publique

Selon la formule de Camus, on est permis de douter de la bienveillance des planificateurs qui prétendent agir dans l’intérêt des populations en élargissant le recours à la mise à mort médicale.

Au Royaume-Uni par exemple, les personnes souffrant de retard mental ont été informées en 2021 que les autorités avaient décidé que si elles contractaient le Covid et étaient admises à l’hôpital, on ne tenterait sur eux aucune procédure de réanimation ; en substance, on leur indiquait que leur handicap justifiait de les laisser mourir.

L’année précédente, ce sont les personnes âgées qui furent victimes du même sort : une même décision de non-réanimation aurait entraîné des morts totalement évitables.

En 2022, une étude publiée dans le Journal of Medical Ethics («journal de l’éthique médicale») confirmait ce recours élargi et ad hoc à la mise à mort dans le contexte de la «pandémie» de Covid. Les chercheurs indiquent que plus de la moitié des médecins interrogés au Royaume-Uni étaient désormais moins susceptibles de réanimer les patients, surtout s’ils étaient «frêles».

Au Canada, la loi sur l’euthanasie a été élargie en 2021 pour permettre à plus de patients d’être mis à mort ; dès lors, il n’est plus nécessaire d’avoir d’une maladie mortelle, il suffit d’avoir une «affection physique grave et chronique». Il est prévu que la loi soit encore élargie après 2027, pour permettre aux malades mentaux de subir le même sort.

La loi change, et les mentalités aussi : le recours à l’euthanasie est considéré au Canada comme un acte médical de plus en plus normal ; c’est devenu apparent lorsqu’une une patiente de 56 ans atteinte d’infirmité motrice cérébrale s’est vue proposer ce mois-ci une mise à mort. On apprend que les personnes en difficulté financière recourent dans ce pays de plus en plus souvent, et en tout légalité, à l’euthanasie active.

Parfois, cette philosophie de mort éclate encore plus nettement : un professeur d’économie de la prestigieuse université américaine de Yale a par exemple déclaré l’année dernière que l’euthanasie pourrait être rendue obligatoire pour les personnes âgées au Japon, dans la mesure où elles représenteraient selon lui un fardeau trop important pour la société.

Pour aller plus loin

L’euthanasie active, inimaginable il y a une génération, semble arriver en France, qui paraît décidée à suivre l’exemple des Pays-Bas et du Canada. En fin de compte, ce sera à la nouvelle Assemblée nationale de décider dans quelle mesure elle abonde dans le sens du Grand Orient de France.

Pour aller plus loin, les lecteurs sont invités à consulter deux documents vidéo : d’abord l’excellente enquête de Pierre Barnérias, qui a déjà 10 ans. Ensuite l’émission de Pierre Chaillot diffusée en direct le mois dernier, en compagnie de Valérie Ferrier, journaliste, et Eric Mercier, infirmier en soins palliatifs, qui ont présenté les résultats de leurs investigations concernant la question de l’euthanasie.

Les deux vidéos figurent ci-dessous.

source : Essentiel News